J’adore raconter mes premières fois et aujourd’hui je vais vous raconter ma première fois avec l’argentique, ma première pellicule.
Il y a quelques semaines, j’ai ressorti de la poussière un Canon AE1 qui avait appartenu à mon beau-père. Il l’avait acquis à sa sortie en 1976. L’appareil a dormi dans sa boite depuis plus de 20 ans et j’ignorais s’il fonctionnait. C’est un bel objet vintage, un petit bijou équipé d’une focale fixe de 50mm, d’une focale de 35mm et d’un téléobjectif.
J’aime bien sa ligne, son revêtement et sa mécanique un peu bruts.Après une première prise en main, des nouvelles piles et une pellicule mise à l’envers, je me lance et fais mes premiers pas.
Les premières sensations
Je l’ai emporté dans mon sac lorsque je suis allée photographier les passages du XIème. J’ai bien aimé photographier avec l’appareil. Il y a une sensorialité plus forte qu’avec mon APN : le clac du déclenchement qui sonne comme un bruit de ressort, l’aiguille du pose-mètre qui semble rebondir, la mécanique de la pellicule qu’on rembobine à chaque photo… Il y a tout un rituel mécanique qui fait le charme de ces appareils photos et qui donne des sensations complètement différentes de celles du numérique.

Une des premières photos prises au Passage Verdeau
Côté photographie, chaque déclenchement est une montée d’adrénaline car ici, chaque photo représente une valeur, donc pas question de prendre 30 fois la même avec des ajustements. Un millier d’interrogations viennent à l’esprit : “Est ce que j’ai bien cadré ? La lumière est elle suffisante ? Je crois que j’ai bougé … ca va être flou ?” J’ai déjà l’habitude de photographier en manuel donc je n’ai pas trop tâtonné.
Par contre, l’absence d’écran de contrôle m’a un peu perturbée. Une fois la photo prise, il faut passer à autre chose pour ne pas trop se bloquer. Il faut se faire confiance.
Je me suis souvent dit: “Bon… je ne sais pas mais on verra bien au développement.” On laisse planer le doute ou le rêve d’une super-photo. Et ça fait du bien de rêver.

La dernière de la pellicule devant le métro.
J’ai trouvé que l’argentique était une approche de la photo beaucoup plus reposante. L’écran de contrôle me pousse à toujours vouloir faire mieux. Ici, à part quelques exceptions, je n’ai pas fait de seconde photo. La pellicule s’est déroulée tranquillement au gré des opportunités, sans chercher la perfection.J’ai aimé ne pas être dans l’euphorie de déclencher. Je me suis posée la question si la photo en valait la peine, si j’aimerais la prendre. J’ai pris mon temps pour cadrer, ajuster mes réglages. Ce sont des moments qui m’ont connectée à la photo dans une forme de lenteur plus qualitative. Il faut que tous les paramètres soient réunis pour que la photo soit bonne.Les photos qui en ont découlé, ont à mes yeux plus de valeur parce que je me suis vraiment appliquée à les prendre. Les plus réussies m’ont vraiment comblée.

Transition mercantile : passer à une autre saison en vitrine.
Les premières photos
Quelle déception lorsque je suis allée chercher les photos ! Elles étaient charbonneuses, baveuses, trop contrastées (du blanc, du noir mais pas de tons gris) et manquaient de netteté. Après avoir posté mes interrogations sur le forum Nicéphore, j’ai fini par avoir quelques réponses :

Une photo scannée. Des tons noirs et blancs. Absence de gris et pertes de détails dans le carrealge. les noirs sont bouchés et charbonneux avec beaucoup de grain.
- J’avais une pellicule à 125 asas et pour les Passages, j’étais souvent trop juste pour une exposition correcte. J’ai sorti beaucoup de photos sous-exposées ou floues (vitesse trop basse). Dans l’ensemble, le rendu est sombre.
- Le tirage par le labo a du compenser mon sous-exposition en boostant les contrastes ?
- J’ai lu sur des blogs que l’Ilford FP4 plus 125 iso est réputée pour donner de forts contrastes.
- Le lieu était très contrasté en ombres et lumières.
- On m’a répondu que le rendu dépend de la pellicule et du développement et que le meilleur tirage est celui que l’on maîtrise …
Bref, j’ai cumulé les difficultés, je n’ai pas pris les options les plus simples pour débuter. Il aurait fallu acheter une pellicule plus passe-partout en 400 asas ou photographier en extérieur avec moins de contrastes.
Le développement m’a couté une blinde : 60 euros pour 36 poses parce que la chimie de la pellicule n’était pas standard. Vous imaginez ma tête lorsque j’ai parcouru les photos ? En soi, les photos n’étaient pas ratées mais le rendu sur papier était vraiment décevant.
J’aurais pu ranger mon appareil et oublier cette expérience mais c’est mal me connaître. Sur les conseils de mon formateur, j’ai observé mes négatifs. Je les ai faits numériser par mon labo car je ne suis pas équipée pour les observer finement. J’ai constaté des différences avec la version papier : plus de détails, moins de densité dans les noirs et j’en ai déduit les conclusions ci dessus. La numérisation m’a aidée à rattraper quelques photos avec Light Room et diminuer ces contrastes.

Negatif numérisé. Correction des contrastes : moins de hautes lumières et ombres moins intenses. J’ai légèrement redressé la photo
Hyprocrite l’argentique ?
Quelqu’un va t’il me dire que l’argentique c’est l’argentique ? Et qu’en principe on ne retouche pas les négatifs avec des logiciels photos parce que le développement artisanal doit permettre de réaliser les ajustements nécessaires ?
Depuis quelques temps, cette question excite ma curiosité au plus haut point. A part une vidéo très rassurante de Baptiste, bloggeur d’EMGK, j’ai trouvé peu de réponses claires à ce sujet. Je vous invite d’ailleurs à voir sa chaîne Youtube. Même si il parle d’argentique, il a une approche de la photo assez similaire à la mienne avec des recherches créatives autour de défis.
Dans l’ensemble des autres blogs, je constate une posture mal assumée à dire que la photo argentique a été retouchée par logiciel . J’ai posé plusieurs fois la question de façon directe sur des forums et je n’ai pas eu de réponse… Pourquoi on ne me répond pas ? C’est mal de retoucher ses photos argentiques ?
Les photos
Comme je vis avec mon temps, je profite des moyens techniques mis à ma disposition. Je vous présente une petite sélection après numérisation du négatif par mon labo et retouche légère sur Light Room : lumière, ombres et contrastes.

Passage des Panoramas

Passage Jouffroy

Passage des Panoramas

Commandant Cousteau aux lingots
Argentique : une nouvelle histoire d’amour ?
Je pense que l’argentique est un bon complément de ma pratique photo. Je n’irais pas jusqu’à dire qu’il remplacera mon APN car je trouve que le numérique offre plus de possibilités. L’argentique ne fait pas de moi ni meilleur, ni pire photographe mais les photos que j’ai réussies ont une valeur plus grande à mes yeux.
Je trouve que la pratique est reposante. On mise moins sur la quantité et je vis très bien avec cette frugalité heureuse. Ce qui me freine un peu, c’est la déception du développement sur papier. Cela faisait partie d’une de mes motivations à passer à l’argentique ; je voulais avoir des photos papier.
On m’a fait comprendre que pour avoir le rendu désiré, il faut développer soi-même. Je ne compte pas vraiment me lancer dans la chimie : pas le temps, pas de place, pas envie. Alors concevoir l’argentique sans photo papier… j’ai un peu de mal.
J’ai fait développer une pellicule couleur dans la foulée. J’ai continué sur ma lancée : numérisation des négatifs par le labo, pas de tirage papier et retouches sur Light Room. Comme d’habitude, le rendu couleur m’a davantage séduite. Je n’ai pas eu de problème de rendu sous-exposé cette fois-ci. La pellicule était une Kodak Gold 200 Asas.Et vous ? Avez vous testé l’argentique ? Qu’en avez-vous retenu de cette expérience ?

J’ai profité d’une pause pour revenir aux Passages et essayé une pellicule avec plus d’isos – Ici 200

Passage Verdeau : Paris est toujours Paris.
Bonjour escampette
Ah le AE1 ! Mon premier boitier « à moi » pour remplacer les Rolleiflex de mon beau-père. J’aimais passer mes nuit blanches les mains dans la soupe du labo du club photo. J’ai trouvé moins excitant le tirage couleur, le n&b est infiniment plus créatif dans l’éventail des interprétations à mes goûts.
Vous prouvez que ce n’est pas la technique qui fait la photo, mais le regard et la sensibilité de celle qui se cache derrière l’objet. Avez-vous appréciée la subtilité qu’apportent les grains d’argent par leurs rondeurs à vos images, vous à qui la nostalgie de ce temps presque révolu est étrangère.
Pour les problèmes d’expositions de votre AE1, une visite à l’atelier serait envisageable pour contrôler le bon fonctionnement du rideau.
Cordialement
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Bonjour ! Merci pour votre sympathique retour 🌸 J’ai effectivement porté mon Canon en atelier . Après étude du négatif , il s’avère que le tirage a été trop contrasté et le tirage papier avait empiré les choses. Je ne développe pas moi même par manque de place et par sécurité pour mes enfants. La leçon de cette mésaventure est que le choix du labo à qui confier ces prestation est primordial. Bien d’autres expériences ont suivi et m’ont encouragée à utiliser cet AE1.
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