Mes proches et mes followers sur Instagram m’ont vue poster une série un peu étrange. Cet attrait soudain pour les oeufs cassés en a inquiété certains. Pas de panique ! Je répondais aux consignes du devoir 10 de l’Institut Nicéphore.
Ce travail proposait d’explorer une matière de son choix. En une série de 7 clichés, l’idée était de redécouvrir cette matière sous différents états. Ce devoir comporte une double contrainte : une contrainte créative pour la mise en scène de la matière et la recherche d’effets et une contrainte technique. Cette série impose un vrai travail avec la lumière, d’étudier son impact sur sa texture, ses couleurs.
Je n’ai pas cherché mon sujet longtemps. J’avais envie de travailler autour de l’oeuf, parce que ses états peuvent être multiples et sa forme, la texture de la coquille me plaisent beaucoup visuellement. Il n’est pas toujours nécessaire d’aller bien loin pour trouver des matières sympas. Lorsque j’en ai parlé à mon formateur, il m’a mise en garde sur le fait que l’oeuf doit être impeccable pour que la série fonctionne. C’est vrai qu’un oeuf trop cuit avec un jaune qui tire vers le gris… beurk !
Premières explorations – Photos prises sur un papier bleu marine réfléchissant. Jeux d’ombres avec la lumière du soleil
Recherches
Avant de me lancer, j’ai fait quelques recherches d’inspiration. Il y a deux photographes culinaires dont j’admire particulièrement le travail et j’aimerais bien être un jour aussi talentueuse qu’eux. J’aime leur travail sur la couleur et leurs cadrages.
Laurent Rouvrais : son univers est frais, lumineux et coloré. En apparence, ça a l’air simple à faire mais en réalité, il y a de la matière grise, du talent et une maitrise technique de haut vol derrière ces cadrages et choix esthétiques. Rien n’est laissé au hasard.
Jonathan Thevenet : un style plus sophistiqué. De vraies recherches autour du graphisme des plats. Son approche est plutôt minimaliste, avec des lignes fortes, beaucoup de courbes. J’aime bien la façon dont il travaille avec les clair-obscurs.
L’organisation
Alors bien sûr, j’ai fait ma série avec les moyens du bord. Ici, pas de studio photo. J’ai joué avec la lumière naturelle et j’ai choisi de travailler l’oeuf avec un fond bleu pour créer un effet de contraste avec le jaune.
Les rendus plus ou moins lumineux du fond se modèlent avec la lumière. Les prises de vue ont eu lieu le matin par temps gris. Parfois, lorsque le soleil était de la partie, je fermais un rideau non occultant pour limiter la lumière trop dure.
Côté organisation, je vous mets quelques photos de making-off. C’est assez simple : utilisation d’un trépied, le papier bleu est courbé pour éviter un arrière plan parasite. La photo est prise soit face à la source lumineuse, soit avec une source latérale.
J’ai choisi une grande ouverture de diaphgramme (2.8 à 6) car je souhaitais des rendus doux et « gommer » le grain du papier bleu. Je suis restée à 100 Iso et j’ai ajusté la vitesse selon le niveau de lumière. J’étais souvent entre 1/8 et 1/30 selon les conditions.

La série
J’ai choisi un format carré pour uniformiser le rendu. Pour ma sélection, j’ai privilégié les photos qui ont une unité dans les fonds bleus et les cadrages. Certaines photos étaient parfois plus jolies mais elles me semblaient détonner dans le cadre de la série.
Le focus étant sur la matière, j’ai isolé les photos pour lesquelles d’autres éléments pouvaient voler la vedette. (serviette, sel, mouillettes…).
La gageure dans cet exercice, c’était d’avoir un fond bleu uniforme. Et là… je n’y suis pas arrivée. J’étais tributaire de la lumière naturelle. J’aurais du tout shooter la même journée mais je devais cuisiner mes oeufs, et je manque clairement d’endurance. Je fatigue au niveau de la concentration et je ne suis pas capable d’en shooter 7 d’affilée. C’est l’habitude qui me manque !
Quelques photos ont un rendu un peu terne lorsque le jaune est absent. Le bleu ne claque pas assez. Ce n’est pas une couleur facile pour du culinaire. Mon formateur m’avait prévenue et j’en conviens. Les photos sur fond bleu que j’ai vues, ont souvent une très belle lumière en arrière plan et des touches de couleur qui claquent.
Des astuces :
Le rendu du jaune va rendre des tonalités plus ou moins jaunes selon la couleur du fond utilisé et la lumière. Le bleu a permis de vraiment le faire ressortir par effet de contraste coloriel.
La cuisson de l’oeuf est clef. Les rendus dorés sont principalement liés à des temps de cuisson maîtrisés. Pour la photo de l’oeuf dur, 6 minutes de cuisson ont suffit – l’oeuf est placé dans l’eau bouilante – J’ai écalé la partie la plus ronde de l’oeuf, (car le jaune glisse dans le fond) et je l’ai coupée au couteau. J’ai ensuite creusé avec une pointe de couteau pour donner une impression d’irrégularité.

L’oeuf dans le bol a été cuit 5 minutes pour être mollet et a été mélangé dans du yaourt.
Pour l’oeuf coque, j’ai eu un temps de cuisson de 4 minutes et la photo a eu lieu aussitôt pour éviter que les couleurs ne se détériorent. Pour de belles mouillettes, j’ai fait griller mes toasts. Cela facilite la découpe et l’étalage du beurre

L’oeuf au plat a été cuit 5 minutes dans une poêle beurrée pour permettre de le transvaser dans une assiette sans le casser.
Pour obtenir un jaune d’oeuf pas trop liquide, vous pouvez pôcher l’oeuf 3 ou 4 minutes dans l’eau. Lorsque vous le pôchez, cela veut dire que vous le plongez dans l’eau bouillante sans sa coquille. Le jaune va se solidifier légèrement et ne se percera pas aussi facilement.
Pour cette photo ci dessous, j’ai reproduit la même installation que ci-dessus. Fond bleu, trépied, face à la fenêtre.
J’ai fait tenir la cuillère par mon fils. J’ai mis mon appareil en mode retardateur à 10 sec + mode rafales. Entre temps, j’ai cassé mon oeuf et je l’ai laissé tomber dans la cuillère dès le début de la rafale.
Cette image n’était pas vraiment attendue. L’oeuf est tombé dans la cuillère et a glissé sur le coquetier, entraînant sa chute. La vitesse était trop basse pour faire un bel arrêt sur image et provoqué cet effet de flou. Dommage.

Bilan
J’ai adoré faire cet exercice. Et au risque de me répéter, la photographie de natures mortes est une vraie découverte pour moi. Biensûr, je suis très loin du travail des deux photographes cités ci dessus mais j’étais contente de mon travail.
A travers mes photos de natures mortes aux parfums, j’ai eu l’impression d’avoir compris pas mal de choses sur les cadrages. J’ai compris à quelle distance et quelle focale, mon objectif commençait à faire des distorsions. A force de tourner autour de mes compositions, j’ai fini par sentir les différents rendus que ma position par rapport au sujet impliquait.
En observant les photographes culinaires, j’ai fini également par comprendre comment la lumière venait et comment les prises de vue étaient organisées. C’est un vrai métier.
Je compte continuer mon travail sur les natures mortes. Je poursuis mon travail sur celles au parfum et je vous parlerai bientôt d’un projet de photos de packagings sur lequel je bosse pour mon entreprise.
Je finis ce billet sur une crème aux oeufs et vous partage la recette de ma maman que j’ai appliquée pour la photo.

Pour 6 personnes
1/2 litre de lait
7 cuillérées à soupe de sucre
3 oeufs
1 baton de vanille
Pour le caramel : 75 gr de sucre ou 15 morceaux de sucre
Caramelisez le moule ou les moules individuels : mettez sur feu moyen le sucre mouillé jusqu’à ce qu’il prenne la couleur désirée. Enduisez le fond et les parois du moule et laissez refroidir.
Faîtes bouillir le lait avec le sucre et la vanille.
Allumez le four à 170 degrés
Battez vivement les oeufs à la fourchette dans un grand saladier. En continuant de battre à la fourchette, versez le lait bouillant sur les oeufs. Trés doucement au début et de plus en plus vite dès que la moitié est incorporée.
Versez cette crème liquide dans le ou les moules caramélisés.
Pour la cuisson au four, posez le ou les moules dans un grand récipient. Isolez le fond avec du papier absorbant plié. Remplissez ce grand récipient d’eau. Placez le ou les moules dedans. Les recouvrir soit d’aluminium ou d’un couvercle.
Cuisez les à feu doux – 170 degrès pendant 45 minutes. Les crèmes sont cuites lorsqu’elles sont fermes au milieu. Laisser refroidir avant de démouler.
Bonsoir Emmanuelle.
Une très belle série , tu as réussi à sublimer un oeuf, avec ce joli bleu. J’adore !
J’admire ta patiente à chercher, tourner autour de ton sujet pour trouver la bonne couleur, la bonne lumiere, le bon cadre. Bravo .🙂
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Merci Nadine. La patience n’est pourtant pas mon point fort 😀, mais la passion oui !
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Waouhhh, j’avais entrevu quelques photos mais là… Toutes tes explications nous font comprendre que « la photo alimentaire » ce n’est pas vraiment évident et que tu n’as pas triché avec des colorants , des gélatines etc… donc bravo, le rendu texture/ couleur est très bon! Et « l’accident » ajoute un flou qui rend ta série naturelle! Est-ce que le formateur va apprécier ? Tu nous diras le retour?
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Merci Brigitte . Très contente de lire ton retour ! La série a été très bien reçue par mon formateur. Un seul bémol : le fond bleu ternit un peu l’ingrédient. En culinaire le bleu et le vert ne sont pas les grands alliés de la photo. Sinon, j’ai fini par penser que la lumière est un facteur déterminant dans le rendu . En tournant autour du sujet on s’aperçoit que les rendus changent énormément selon l’impact de la lumière . Pour cette série , je confirme ni gélatine ni colorant . Mais il y a eu du post traitement sur les ombres pour les adoucir ou les durcir selon les prises.
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De nouveau une très belle série! Travail n°10, cela veut dire que tu as bientôt fini ta formation?
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Coucou ! Merci Émilie. Non je n’ai pas fini. Il y a 19 devoirs au total 😀Je viens de franchir la moitié !
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Merci, je comprends mieux le minimum d’un an de formation! En tout cas, elle te réussi bien, hâte de voir tes prochains travaux!
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Je ferai un bilan de mi-parcours bientôt !
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